Ce qu'on cherche, on le trouve

Sophocle avait bien raison : à Paris, les objets perdus deviennent la plupart du temps des objets trouvés.
Le Service des Objets Trouvés, qui se targue d'être l'un des plus anciens du monde, plus que bicentenaire, est sis au 36 rue des Morillons, dans notre 15ème.

Sachez, chers lecteurs (à répéter 10 fois de suite très vite), qu'il y a assez longtemps de cela, tout objet égaré appartenait au roi, ou au seigneur haut justicier (un genre de superhéros très grand).
Voilà : il fallait faire attention à ses petites affaires, sinon, zou, ça partait illico presto dans les placards du chef. Ca simplifiait amplement les démarches, mais celui qui trouvait un objet sans maître (c'est comme ça qu'on dit) devait le déclarer immédiatement et le rapporter sur le champ au seigneur et commandeur.
En même temps, à ces époques, on peut imaginer qu'il n'y avait pas grand chose à perdre, vu le peu qu'on possédait...

Sans entrer dans le détail de l'historique, car co-existait aussi un droit d'épave (mais tout est expliqué là), la Révolution Française décrètera le 1er décembre 1790 que tout bien sans maître appartient à la nation.
Ensuite, en 1804 le Préfet de Police demanda aux commissaires de police de faire porter dans ses locaux les objets trouvés déposés dans leurs bureaux.
Puis en 1850, une première version du service des objets trouvés sera créée, recueillant quand même 10 000 objets par an. Mais à cette époque, le système de récupération des objets n'était pas très au point, et le zèle poussé à l'extrême des employés de ce nouveau service, ajouté paraît-il à des locaux pas très ragoûtants, voire insalubres, faisait que pas grand'chose n'était finalement réclamé.
Il faudra laisser passer quatre décennies, pour que le Préfet Louis Lépine, une vraie bête à concours, crée le 13 octobre 1893, un service des objets trouvés, destiné à récupérer et centraliser les objets, mais aussi à organiser la restitution à leurs propriétaires, et à remettre les objets non réclamés à l'administration des Domaines.

C'est depuis 1939 que le service des objets trouvés est installé au 36, rue des Morillons.
Aujourd'hui, tout ça est parfaitement huilé et organisé, sous l'égide de la Préfecture de Police (le contraire eût été étonnant...).
Il paraît que le Service des Objets Trouvés reçoit environ 140 000 objets par an, de toute nature, de toute taille, avec une impressionnante cohorte de portefeuilles, de parapluies, à laquelle s'ajoute désormais celle des téléphones portables.
Du boulot pour la quarantaine d'employés qui doit quotidiennement trier, répertorier, stocker près de 400 objets, et investiguer pour en retrouver les malheureux propriétaires : chaque jour près de 300 d'entre eux, plein d'espoir, défilent ainsi au guichet...


Il paraît aussi que les employés ont réuni quelques pièces insolites : parmi elles un crâne humain (probablement égaré par M. Hamlet), une langouste naturalisée (qui donc se balade dans Paris avec une vieille langouste dans son sac ?), quelques médailles dont une Légion d'honneur, une robe de mariée retrouvée dans un taxi (finalement, la dame a changé d'avis)...

Voilà quelques mystères révélés à vos yeux ébahis chers lecteurs.
De quoi se sentir moins perdu...